06. La douleur


La douleur [3, 4, 57] est une sensation pénible et désagréable perçue par l'organisme en réponse à un stimulus douloureux. Habituellement, elle correspond à un signal d'alarme du corps pour signaler une menace de son intégrité physique.
 
La douleur peut également désigner des souffrances d'ordre sentimental (par exemple suite à un décès), on ne traitera pas ce type de douleur ici.
 
Même s'il s'agit d'une expérience désagréable, les circuits de la douleur jouent un rôle capital dans notre survie [48, 187], car c'est cette sensation qui nous force à agir malgré nous afin d'échapper à un danger éventuel.
 
La douleur est le symptôme numéro 1 dans la plupart des maladies [208, 209]. Sa description clinique est d'un intérêt majeur pour aboutir à un diagnostic exacte et par la suite un remède adéquat. Toutefois, la douleur peut être tellement excessive et intolérable qu'elle devient un mal en elle-même. Plusieurs stratégies thérapeutiques peuvent et doivent être élaborées afin d'éviter au malade de souffrir.

1. Physiopathologie de la douleur :

1.1. De la périphérie au SNC :

Le message nociceptif [107] (douloureux) résulte d'une stimulation douloureuse au niveau des terminaisons nerveuses des structures cutanées [69], musculaires, articulaires ou viscérales. Ce message est ensuite véhiculé par des voies nerveuses afférentes vers le SNC [1, 4].
 
Les nocicepteurs polymodaux (activées par des stimuli mécaniques, thermiques et chimiques) et les fibres C amyéliniques jouent un rôle majeur dans la détection, le codage de l'intensité et la transmission de la douleur cutanée. Ces fibres C sont amyéliniques avec un diamètre inférieur à 1 µm [3] et une vitesse de conduction lente inférieur à 2 m/s. D'autres types de fibres participent aussi à la conduction des signaux nociceptifs, par exemple les fibres A delta (peu myélinisées) [57].
 
Après leur trajet dans les nerfs périphériques, les fibres afférentes nociceptives rejoignent le système nerveux central [41] au niveau des racines postérieures de la moelle épinière ou bien au niveau du tronc cérébral pour les nerfs crâniens.
 
La substance P (neurotransmetteur principal de la douleur) et le glutamate excitent les neurones de la corne dorsale de la moelle [1, 38, 107]. L’influx nociceptif suit alors la voie spino-thalamique (extra-lémniscale) [145] spécifique de la thermo-nociception.

1.2. La modulation des messages nociceptifs :

Une fois les messages nociceptifs de la périphérie transmis au SNC, il va être modulé par différents contrôles [35].
 
Les fibres afférentes (A alpha et béta) qui transmettent les messages tactiles vont inhiber la nociception au niveau médullaire. Ceci explique notre attitude de toucher l'endroit où on s'est fait mal juste après l'accident. Ces phénomènes inhibiteurs peuvent être pré-synaptiques ou post-synaptiques (Système de la porte, gate-control [39]).
 
Au niveau du tronc cérébral il existe des neurones qui sont à l'origine de voies descendantes inhibitrices [38, 107] ( par exemple ceux au niveau de la substance grise périaqueducale [3]). Ces neurones entraînent par le blocage des voies nociceptives une analgésie au niveau de la zone qui fait mal.

2. Les différents types de douleur [69]:

2.1 Selon le mécanisme de la douleur :

2.1.1. Douleur de nociception :

Celle-ci représente le modèle classique de réception, transmission et perception de la douleur selon les mécanismes susmentionnés.

2.1.2. Douleur neurogène [207]:

Se dit des douleurs qui ne résultent pas de lésions tissulaires, mais qui sont dues à une interruption des voies nociceptives entraînant une perturbation du système de transmission.

2.1.3. Douleur psychogène [207]:

Se dit des douleurs qui n'ont aucune explication organique.

2.1.4. Douleurs projetées [3, 209]:

Les fibres de la voie spino-thalamique reçoivent parfois des afférences convergentes à la fois de la peau et de certains viscères. En cas de réception d’un influx nociceptif, le cerveau attribue la source du stimulus à la peau qui est d’ailleurs la plus sollicitée.
 
C’est le cas par exemple lors d’un infarctus du myocarde où c’est la main gauche et la mandibule qui font mal bien qu'il n'y a pas de lésion à leur niveau.

2.2 Selon l'évolution de la douleur:

  • Douleur aigüe [48].
  • Douleur chronique [69].

3. Evaluation de la douleur :

3.1. Echelle verbale simple (EVS) [210]:

On demande verbalement au patient d'évaluer sa douleur selon 4 à 5 catégories desquelles résultera un score, 0: Pas de douleur, 1: Faible, 2: Modérée, 3: Intense, 4: Extrêmement intense.

3.2. Echelle numérique (EN) [208]:

Celle-ci permet au patient de noter la douleur en sachant que la note minimale est 0 et que la note maximale intolérable est 10.

3.3. Echelle visuelle analogique (EVA) [91, 179]:

C'est une réglette qui présente d'un côté une ligne subjective et de l'autre côté une réglette de 100 mm. Le patient tracera un trait ou avancera le curseur en fonction de l'intensité de la douleur allant de (pas de douleur) à (douleur maximale imaginable). Le soignant fera correspondre la notation se trouvant à l’arrière au déplacement du curseur de la réglette.

3.4. Autres méthodes dites pluridimensionnelles [208]:

Cette catégorie regroupe plusieurs types de questionnaires et des échelles comportementales.
 
Il n’est pas nécessaire de souligner la subjectivité des moyens susmentionnés dans l’évaluation de la douleur, ce sont plutôt des éléments d’orientation et de suivi de l’évolution.

4. Les traitements antalgiques :

Les mesures thérapeutiques doivent avant tout cibler l'origine de la douleur mais doivent aussi viser le soulagement du patient [69]. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a classé les différentes substances antalgiques en trois niveaux selon leur activité. Il est recommandé de suivre cette stratégie palier par palier dans la prise en charge de la douleur [91].

4.1. Le niveau 1 :

Le paracétamol et les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) tels que l’aspirine, l’ibuprofène, la noramidopyrine (ou métamizole)... En cas de douleur jugée faible ou modérée par un médecin, ces médicaments doivent être prescrits en premier.
 
Ils agissent principalement par inhibition de la cyclo-oxygénase, une enzyme responsable d’une cascade de réactions chimique à l’origine, entre autres, d'une douleur.
 
Les effets secondaires les plus fréquents de ces médicaments sont surtout gastriques, mais d’autres troubles très graves peuvent survenir en cas de surdosage.

4.2. Le niveau 2 :

Les antalgiques opiacés faibles [211], dérivés (allégés) de l'opium et de la morphine, comme la codéine, la dihydrocodéine, le dextropropoxyphène et le tramadol...
 
La codéine et le dextropropoxyphène sont souvent associés à des antalgiques de niveau 1, car leurs modes d’action sont différents et complémentaires, leur action est synergique. Ce type de substance agit au niveau du SNC sur des récepteurs spécifiques responsables de l’abolition de la douleur.
 
Les principaux effets secondaires comportent : constipation, somnolence, nausées, vomissements, voire difficultés respiratoires. Ce type de composés expose à une dépendance physique.

4.3. Le niveau 3:

Les antalgiques opioïdes forts, la morphine [48, 211] et ses dérivés. Ces médicaments ont les mêmes caractéristiques et le même mode d’action que les précédents, mais sont plus puissants. Ils sont utilisés en cas de douleurs intenses ou rebelles aux antalgiques de niveau 2. Ils ont les mêmes effets secondaires que les antalgiques opiacés faibles et peuvent entraîner les mêmes problèmes de dépendance.